Textes

La revue de février (paru dans P45)

À une époque, alors que l’Agence PMI semait la peur et l’opprobre au sein de la rédaction de P45, on m’a demandé de faire rimer frugalité et qualité. Ce n’est pas une pratique qui fera peur au rédacteur du web que je suis, domaine qui tend à récompenser les 1 avec 0 [joke binaire].

Comme mesure de dégraissage, cette revue a dû se faire sur seulement 28 jours. On coupe où on peut.

Février, mois des Noirs

Dans un soubresaut imprévisible de l’histoire, le mois des Noirs est celui où toute l’attention du monde a quitté Haïti pour se diriger vers la seule région de l’Afrique qui n’est pas noire.

Localement, les Noirs n’ont pas connu un traitement médiatique différent de ce qu’on leur réserve habituellement le restant de l’année. Entre les médias qui ont couvert 58 fois plus de pages avec le meurtre de Bad News Brown qu’avec ses faits de carrière et les stratégies schizophréniques de Jean-François Harrisson, il ne restait plus beaucoup de place pour de bonnes nouvelles.

Et pourtant!

Ça a été le mois le plus rafraîchissant depuis longtemps dans le Merveilleux Monde du Rap, avec la prestation de Tyler the Creator et Hodgy Beats du crew Odd Future à l’émission de Jimmy Fallon. Les nouveaux messies sont là.

Février, mois des sports

Outre les habits de robots de la bande à Fergie, je retiendrai surtout de ce XLVe Super Bowl le Black & Yellow de Wiz Khalifa, la plus grande contribution culturelle de l’histoire de la ville de l’acier. L’adaptation de Lil Wayne, qui a fait son Green & Yellow en soutien aux Packers, était pas mal non plus.

Février 2011 aura été le mois où les gardiens de but se sont reconnectés sur leur cerveau reptilien. Dans une des plus grandes sessions d’embrassades sur glace, Carey Price a valsé avec Tim Thomas dans un ballet qu’on croyait réservé seulement pour le Vendredi saint.

Quelques jours avant, à Pittsburgh, Brent Johnson montrait de manière on ne peut plus claire au cerbère des Islanders les pas du fameux foxtrot pennsylvanien.

Rien n’est jamais simple quand on mélange orgueil municipal, hockey et fonds publics. L’annonce par la «punchline» Labeaume-Charest-Aubut d’un nouvel amphithéâtre à Québec n’a surpris que ceux qui ne comprennent rien à l’électoralisme. D’ailleurs, la meilleure analyse du dossier n’est pas venue des Tremblay, Dubé, Gagnon ou Brunet, mais de Michel David.

Je ne sais pas si John Furlong, le président du Comité organisateur des Jeux de Vancouver, a eu vent du succès que son livre a eu ici. Blâmer publiquement Gilles Vigneault, ça garantit une certaine visibilité. Surtout quand ce qu’on lui reproche, c’est de ne pas avoir voulu que son Mon pays soit utilisé pour faire la promotion du Canada. Maxime Bernier a bien essayé d’utiliser la technique Furlong™ en bashant courageusement la Charte de la langue française à Halifax. Le pauvre Maxime, tristement, semble être aussi bon en polémique qu’au jeu de la politique et de l’amour.

Février, mois de l’espoir

Comme le faisait savamment remarquer mon ami Silver Sly sur Twitter, le million de manifestants égyptiens rassemblés qui ont finalement fait fuir Moubarak représentait 1,25% de la population de l’Égypte. Bien sûr, toute comparaison est trompeuse, mais les 250 000 signataires de la pétition anti-Charest représentent 3,6% des habitants du Québec. Tirez-en les conclusions que vous voulez…

Février, mois des morts

J’ai eu 27 ans le 21 février. C’est une date qui me plaît bien, parce qu’au fil des ans, elle s’est entourée de dates importantes pour des gens qui, d’une manière ou d’une autre, ont eu une influence sur ma vie. Kurt Cobain est né un 20 février. Hunter S. Thompson s’est suicidé le même jour, en 2005. Malcom X Little a été assassiné le 21 février 1965, exactement 32 ans après la naissance de Nina Simone.

Puis le 28 février, ma grand-mère Kayler n’était plus là pour nous interdire d’organiser quoi que ce soit pour son anniversaire. Elle me manque probablement autant qu’au monde de la critique culinaire, à celui du développement de la conscientisation alimentaire et à ceux qui sont allergiques à l’ortie.

*Paru originellement en 2011.